vendredi 5 octobre 2007

Démons du silicium

Par Xavier Inizan

Ce n'est pas dans la littérature de science-fiction ni chez les écologistes radicaux que l'on trouve les descriptions les plus saisissantes des technologies du présent ainsi que de l'avenir, mais parmi les mouvements spirituels contemporains, et particulièrement aux marges du new age. Pour certains sympathisants de l'anthroposophie steinerienne (1) par exemple, la technologie est le domaine privilégié d'un type précis d'esprits démoniaques, les puissances ahrimaniennes. Ahriman, que la religion mazdéenne identifiait à l'esprit du Mal, complète chez les anthroposophes une dyade infernale dont le premier élément est Lucifer ; de ces deux entités maléfiques qui se partagent le sort du monde et se disputent l'âme humaine, l'une est à l'origine des phénomènes naturels, l'autre des produits de la technologie. Selon Steiner, Ahriman, démon des machines, doit s'incarner " à l'ouest " durant le troisième millénaire, incarnation que des sociétés secrètes prépareront ; la création d'internet a été identifiée par quelques interprètes de Steiner comme une composante essentielle de cette préparation, qui perçoivent la toile arachnéenne (" web ") formée par ce réseau informatique comme un espace magique ayant pour finalité l’accueil d’une entité occulte. Ces mêmes interprètes ont décrypté dans la description faite par Steiner du phénomène de matérialisation des " pensées erronées des hommes " le futur que réserve au monde le fonctionnement des serveurs de réseaux automatiques : " De la terre une nuée horrible va s'élever. Leur nature les situera entre les règnes minéral et végétal. Ce seront des êtres ressemblant à des automates, possédant une intelligence d'une grande puissance. Par suite de ce développement, la terre se couvrira comme d'un réseau de toiles d'araignées épouvantable. Ce seront des sortes d'araignées horribles, enchevêtrées les une dans les autres. Leurs mouvements imiteront tout ce que les hommes ont pensé. " (2) . Pour l’anecdote, on rappellera que l’informatique utilise aujourd’hui le terme de " démon " pour désigner un certain type de programme ; par ailleurs, l'image centrale de cette vision apocalyptique - au sens courant du terme -, qui est la toile d'araignée (3), correspondant précisément à la métaphore la plus couramment utilisée dans la description du réseau d'Internet chez ses contempteurs, l'analogie s'imposera en effet d'elle-même dans la galerie mentale d'un contemporain hostile à l'informatique ; suivant cette même optique, le " croisement " " entre les règnes minéral et végétal " évoque irrésistiblement les réalisations de l'ingénierie génétique et les projets des biotechnologies, des gènes de hamster dans le tabac à l'ordinateur moléculaire.

Rudolf Steiner affirmait que c'est grâce au système nerveux qu'Ahriman connaissait la possibilité d'envahir puis de posséder l'homme : " Alors que les forces éthériques de tendance luciférienne peuvent aisément, par la respiration, atteindre le système sanguin, les forces éthériques de tendances méphistophélique ou ahrimanienne n'atteignent que le système nerveux " (4). L'influence exercée par les champs électromagnétiques sur ce système a été étudiée du point de vue scientifique depuis la deuxième guerre mondiale, notamment par les soviétiques. Voici, pour l'exemple, ce que conclut le directeur d'un laboratoire russe, après avoir exposé " aux champs électriques, magnétiques et aux ondes radio " (5) " des milliers d'animaux et de volontaires humains"(6) : " la première cible qui souffre, c'est le système nerveux central " (7). Considérant cet élément et sachant la multiplication de ces champs de par le monde, les prophéties de Steiner s'éclairent d'une lumière pour le moins singulière pour qui les considèrerait comme véridiques. Par surcroît, l'analyse des exégètes steineriens ne s'arrête pas là, qui décrit minutieusement le fonctionnement magique des puces informatiques, opposant le cristal de silicium - le quartz - " dopé " qui compose en partie ces puces, aux cristaux naturels utilisés par les médecines traditionnelles comme l’Ayur-veda. Ces thérapies traditionnelles ont pour point commun une approche holistique ou globaliste de l’être vivant - conséquemment de l’être humain -, qui expliquerait l’action de ces cristaux, lesquels agiraient sur un système énergétique échappant à la perception sensible, système microcosmique relié à une source naturelle, universelle et macrocosmique : ces techniques anciennes permettraient la réactivation de ce lien, et, en conséquence, le bon fonctionnement du microcosme énergétique humain par un effet de réalimentation. Du point de vue sociopolitique, l’accès à ces techniques n’a pas été toujours réservé qu’aux élites sacerdotales, ce qui a été le cas dans les sociétés de type impérial sous couvert d’initiation ésotérique, puisqu’il est tout à fait probable qu’elles formaient un corpus thérapeutique accessible à tous les membres des communautés de type chamanique. Enfin, on reconnaît bien, ici, le phénomène d’inversion, qui serait à l’œuvre avec les technologies actuelles, lesquelles ciblent la totalité du vivant et dont les masses humaines constitueraient la pile énergétique première, ce qui explicite la possibilité de les considérer comme des composantes d’une " magie noire " ayant pour la finalité de nourrir des entités démoniaques, en partie par l’intermédiaire de ces cristaux dénaturés dont la fonction théurgique aurait été en quelque sorte détournée, voire inversée.

Pour en revenir au système nerveux, il est intéressant de relever l'existence d'une théorie dite du " deuxième système nerveux", hypothèse élaborée pour la première fois par un biologiste américain, Harold Saxton Burr - " Historiquement, les premières recherches sur ce thème sont dues à un biologiste de l'université de Yale, Harold Saxton Burr, entre 1916 et 1956. Burr mesure les potentiels électriques sur la peau d'un grand nombre d'animaux, en particulier les différences entre les extrémités du corps, la tête, la queue ou les membres. Il se persuade qu'il existe un "champ bioélectrique" global qu'il appelle le "champ L"" (8). -, puis complétée par Albert Szent-Gyorgi, prix Nobel, qui suggère en 1941 que " les êtres vivants produiraient et utiliseraient des courants électriques de semi-conduction "(9) ; de nos jours, cette hypothèse est approfondie par Björn Nordenström, radiologiste danois, qui affirme que les " courants de semi-conduction empruntent les voies des vaisseaux sanguins et constituent une sorte de deuxième système nerveux " (10) et par Robert Becker, chirurgien orthopédiste adepte des thérapies par l'électricité, pour qui " les champs électriques des courants de semi-conduction sont des messagers et des architectes "(11) qui " passent pas les parois des nerfs, à travers des cellules qu'on appelle gliales ou périneurales " (12). Plus précisément, Becker postule que les " microtubules ", canaux remplis de liquides qui constituent ces cellules, transportent les messages électriques alimentant un deuxième système nerveux.

Source: http://semaphore.blogs.com/semaphore/files/frlaboplanet.pdf

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